L’offrande
Françoise Lefèvre, Le Rocher Juin 2001
Quel remède y a-t-il contre la mort ? Quel remède pour l’agonie d’un amour
? Les mots. Peut-être les mots. C’est en enfer qu’il faudra aller chercher
les mots. Le corps de l’aimé, c’est en enfer qu’il lui faudra le
chercher. Perdu. Cent fois perdu. Quelquefois retrouvé. Extrait des flammes.
Hissé vers la lumière par les bras de l’amoureuse qui traverse le brasier.
Accepter la crémation de ses os, alors qu’elle est encore vivante. Accepter
de brûler vive pour sauver du bûcher les mots de l’amour. Consumer son
esprit pour sauver ce temps qu’il lui reste à vivre.
Après les flammes du bûcher, cette poignée de cendres, ce sont les mots pour
dire l’amour qui a existé. Les écrire avant leur dispersion aux quatre
vents. Les écrire comme on dispose sur une tombe du buis, du houx, de la bruyère,
une poignée de cailloux blancs. Les écrire comme on trace avec son doigt, sur
la terre encore fraîche, le nom de l’aimé. Le temps qu’aura duré leur
amour.
Jeanne & Vivien
1979 – 2000